Mistral noir, par Élise Padovani

Ça commence dans une truffière où Gambette «l’idiot» du village découvre un cadavre en costard trois pièces, nez contre terre. Gambette pense aux mouches rabassières, scatophages, nécrophages. Nous, déjà, aux Érinyes tragiques. On est dans le Luberon, le vendredi 1er août 1975. Sur les routes meurtrières roulent sans airbag, DS, 2CVs et 403. D’anciens hippies devenus bergers vendent du fromage de chèvre sous le regard hostile des autochtones. Les gendarmes changent le ruban de leurs machines à écrire et la dernière guerre est assez proche pour obombrer le présent comme les nuages le ciel quand soufflent les rafales du Mistral Noir. Surtout lorsqu’un fantôme surgi du passé solde leurs comptes à des assassins impunis, infiltrés autrefois dans les maquis de la région.

La vengeance en plat froid, ce n’est pas bien nouveau dans le polar français. On pense à L’Été meurtrier de Japrisot, à La mort n’oublie personne de Daeninckx, au secret des Andrônes de Magnan. Bernard Alteyrac assume ces références et d’autres encore dans ce premier roman très maîtrisé ! Croisant les points de vue, il recrée, sobre et précis, par touches successives, deux époques également révolues donnant naissance à un nouveau personnage d’enquêteur, père attentif, mari résigné : le maréchal des logis-chef Giraud, gendarme comme le Langlois du Roi sans divertissement de Giono. On l’imagine (on l’espère !) déjà récurrent à l’instar d’un Maigret, Laviolette, Carvalho, Montalbano, Wallander, ou Adamsberg, s’étoffant d’affaire en affaire, de mort en mort.

ÉLISE PADOVANI

Zibeline, Juillet 2012

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